COURSE CONTRE LE SOLEIL

 
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(Find the English version at the bottom!)

Je pensais que ce serait drôle de faire du vélo dans le Liechtenstein. Déjà, parce que je n'y connais rien à ce pays, et deuxièmement, parce que je ne sais toujours pas comment prononcer ce mot correctement donc je me suis dit que ce serait une bonne occasion d'apprendre. 

Ce fut grâce à un voyage d'affaires dans la région de Zurich que je me suis dit, pourquoi ne pas pousser le vice. En allant boire un Latte à 6€ de l'autre côté de la frontière pour télétravailler et attendre avec patience la fin de la journée pour aller faire du vélo?

Une fois les derniers mails envoyés, je saute sur mon vélo, direction l'Autriche. Je sais que j'ai dit que j'allais faire du vélo au Liechtenstein mais c'est vraiment difficile de faire un itinéraire sans en sortir. Le départ est tard mais ce n'est pas gênant, au contraire, je poursuis l'heure dorée sur les sommets alpins autrichiens.

Je traverse la frontière et personne ne me demande rien. Je me dirige vers les montagnes et ce que je pensais être une idée brillante, devient progressivement un mauvais running gag à chaque virage en épingle. Je ne sais pas grimper, je n'aime pas particulièrement ça, et pourtant, je trouve toujours le moyen d'y revenir sans cesse. Heureusement, les paysages activent un peu la dopamine. J'ai la sensation d'être récompensée à chaque nouvelle vallée rencontrée et l'angoisse des montées est vite oubliée dans les descentes.

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Malgré les belles vues, il y a une chose que je ne peux pas ignorer. Alors que je continue de monter, lui, le plafond nuageux, reste bien ferme sur ses positions et continue à traîner dans les sommets. Alors que j'approche mon premier col, l'air devient humide et j'essaie de me concentrer sur des morceaux de ciel bleu imaginaire pour oublier le vieil adage qui revient dans ma tête: "Être dans un orage en montagne, franchement, c'est pas ouf.

Je me vois, sur mon vélo, à l'allure d'un escargot, à 60 kilomètres de mon point de départ du Liechtenstein, juste parce que je trouvais ça drôle. J'hésite, mais je ne sais pas trop quoi faire. Je suis pile au milieu de mon itinéraire, dans une vallée entre deux cols. Quoique je fasse, ça va monter et plus j'attends, plus je laisse la chance à la pluie de me rattraper. J'échange mon allure d'escargot pour une allure de mouche. On dirait que ça va vite, mais pas tellement, cela dit, je pense que c'est quand même une amélioration par rapport à l'escargot. Et puis de toute façon, il était dur de penser à autre chose qu'à des mouches, quand je pense aux nombres d'elles qui ont voulu faire la sortie vélo avec moi. C'était sympa, mais j'en avais vraiment pas demandé autant.

Au fur et à mesure que j'approche le col, je réalise ma chance: il ne pleut pas encore. Je prends un moment pour me retourner et regarder la vallée avec ses nuages menaçant, et pendant un bref moment, il y a un trou dans le ciel. Je me saisis immédiatement de mon appareil et sans surprise, des rayons viennent éclairer la montagne en face. Cela ne dure qu'un instant mais je l'ai eu. Cette lumière du soir, orangée, qui vient caresser et enflammer les monts rocheux autrichiens ont su m’émerveiller.

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C'est là que je savoure mon départ tard, et tous ceux qui suivront. Je m'arrête au moindre changement de lumière dans les nuages et je finis la montée vers le col les yeux rivés sur la montagne en face. Le ciel joue avec les nuages et ce qui apparaît disparaît aussitôt. Le soleil ne ressortira pas. J'arrive enfin au col et je me retrouve prise dans la brume. C'est comme si toute la vallée suivante était prise dans un sérieux tas de barbe-à-papa. 

Je commence ma descente et même si ce n'était pas tellement les vues que j'avais espéré, je trouve toujours l'expérience amusante et je suis heureuse d'avoir saisi la seule sortie du soleil plus tôt. La descente est grisante, même si je suis rappelée à la réalité régulièrement par des freins défectueux, qui me font prendre des trajectoires complètement aléatoires. Je ralentis le rythme pour ne pas mourir trop jeune et c'est l'occasion de découvrir les rares paysages qui se laissent entrevoir à travers le brouillard.

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En redescendant, je quitte la nappe nuageuse et le soleil du soir est glorieux. J'apprécie chaque secondes de ce moment et je le savoure.

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Cela dit, cette petite expérience grisante est progressivement interrompue par le dur rappel à la réalité : il est temps pour moi de rentrer dans ce pays dont je ne peux pas prononcer le nom. Même si j'essaie de bien planifier mes sorties, ici, je n'ai pris aucune lumière et je ne compte pas m'assurer de la bonne foi des policiers autrichiens pour savoir si c'est un problème ou non.

Je file à toute allure, ayant laissé tout escargot ou mouche derrière moi, et je repasse la frontière. Je redis bonjour au policier qui m'ignore toujours superbement, comme à l'aller. La nuit commence à prendre ses aises et je rentre à temps à la voiture, comme une cendrillon des temps modernes, sur son vélo gravel, au Liechtenstein.

Texte et photos de Sabine

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I thought it’d be fun to cycle in Liechtenstein. First, because I know nothing of the country, second, before I struggle to pronounce it properly and thought 2020 would be a good year to learn.

A nearby work trip motivated the will to drive there to work in a cafe, drinking way too expensive Latte, waiting patiently for the 2 p.m. clock to ring.

The workday finished, I jumped on my bike and started my ride, direction: Austria. The departure is late but the reason is justified. I want to get the best lights possible and enjoy the golden hours on the mountain peaks. 

I cross the border, no one asks me a thing, and I just keep heading towards the mountains. What I first thought was a great idea, progressively turns into an anguished look every time I see a hairpin turn bringing me up another steep slope. Going up is not my forte, but I don’t know why I keep going for it. Fortunately, the landscapes make up for it and the suffering is rewarded by the new views that unlock at each turn.

Despite the exciting views, one thing that I cannot ignore is the looming dark clouds that seem to be getting denser and denser around the peaks. I try to ignore this tiny voice in my head, during my summer scout camps, saying “a storm in the mountains is an awful timing to be outside.” I think of myself, snail-paced, on my bike, 60km away from Liechtenstein, where I thought it’d be a good idea to cycle. I hesitate but there are not that many choices: I’m at the midway point and going forward or turning around would be the same. I decide to keep going forward and pick up the pace. I am now moving from snail-pace to fly-pace. It seems fast because it’s fast, but really, it’s not that much better from a snail. The speed of a fly seems to be a pretty accurate rendition from my ride though, keeping in mind, how many followed me in the lower elevations of that day.

Progressively, I seem to be nearing the pass and luckily for me, it still hasn’t rained and the sky doesn’t seem to want to move away further from just very angry-looking clouds. I take a moment (several, actually) to stop and look back. Suddenly, I see a very brief hole in the sky. The result is immediate. A side of the mountain starts to light up in this orange glow.

The reason for these late rides finally materializes. I stop everything, put the bike on the side, and keep my eyes on that mountain. The sky plays with the clouds, showing and disappearing in a matter of seconds. I keep my eye on the visor of my camera, attentive for that moment where the sun will fully light up a part of the road. It suddenly does and it disappears as soon as it arrived. The clouds start to take over again and the moment is gone. I stay for a bit, curious to see if that will happen again, before seeing that the grey skies are here to stay.

I get back on the bike and finally reach the top of the pass. The other side is nothing more than white cotton candy. Even though it is not the views I had expected, I was still happy about this private sun showing I got earlier. I ride down, my hands on my faulty-breaks, trying not to die too young. I try to stop, sometimes, when I feel like there might be potential from a second sun break-through. Some pieces of mountains finally show themselves through the mist and the whole atmosphere, with this evening sun, is glorious. 

I appreciate every minute of my decision to go for a late ride. 

That being said, I start at some point to look at the time and see with horror that I do not have much time to go back to that funny name of a country before it becomes pitch black. Because I’m a good planner but certainly not the best, I had gone to Austria without any lights.

Quick as a zebra this time (but a zebra on wheels), I rode back down the mountain. I waved hello to the border police, which didn’t seem more interested this time either. The evening was starting to set and I was back in time, like a modern Cinderella, on her bike, back in her homely Liechtenstein. 

 
ANTHONY RICHELOT